Votre parcours :
1. votre processus de catégorisation
a) Avant que vous n'ayez connaissance des termes appropriés pour désigner votre ressenti et avant que vous ne vous engagiez dans les différentes étapes de votre parcours de transition (sociale - administrative - médicale), les catégories extérieures faisaient-elles sens pour vous ou est-ce que ce sont les relations sociales qui vous rappelaient à la réalité (je pense au moment de l'enfance, de l'adolescence, voire au début de votre âge adulte si vous n'aviez pas la possibilité de vous vêtir comme cela vous convenait) ?
[A indiquer : à quelle étape de votre vie avez-vous appris qu'il existait des mots pour désigner cette inadéquation ? Est-ce qu'avant cela, vous osiez (et pouviez) être vous-même (vêtements, attitude) ? Ainsi, dans quelle mesure avez-vous dû transitioner socialement ?]
b) Avez-vous un besoin de ré-analyse systématique, pour argumenter, en vous, votre sentiment de ne pas correspondre à votre sexe/genre à partir duquel on vous a identifié à l'origine, et pour justifier ainsi le fait de ne pas avoir un corps ni des normes extérieures vous reflétant ? [Il s'agit de pouvoir mieux rendre compte dans quelle mesure votre processus de catégorisation, par la description que vous en faites, est similaire en partie ou pas à celui des personnes autistes.
Et concernant les personnes qui seraient "uniquement" non-binaires (sans transidentité associée), j'aimerais tenter de voir (en fonction de la période où cette forme d'acquisition se produit) si tant un acquis comme "la déconstruction" qu'une réflexion propre menée de soi-même sur la société sont susceptibles de conduire leur processus de catégorisation à différer de celui de la majorité - avec, donc, pour elles aussi une ré-analyse systématique qui se rapprocherait de celle des personnes autistes.]
Si vous ne ressent(i)ez pas le besoin d'argumenter en vous votre sentiment d'inadéquation, comment faites/faisiez-vous alors pour canaliser, pour gérer votre mal-être ?
Est-ce que ce trait cognitif (l'analyse systématiquement - que l'on retrouve aussi dans l'autisme), porte en vous sur le genre et le corps uniquement, ou bien s'agit-il de votre fonctionnement global, au quotidien ? Est-ce un trait de vous-même qui a toujours autant fait partie de vous, ou bien est-ce un trait cognitif qui s'est progressivement renforcé du fait de votre sentiment d'inadéquation (comme s'il s'agissait d'un fonctionnement, d'une manière de fonctionner acquise suite à une habituation consécutive de possibles justifications intérieures) ?
2) A quel moment avez-vous débuté votre parcours de transition (social, administratif, médical) en "sortant du placard" *, et comment avez-vous obtenu la légitimité nécessaire pour initier et avancer dans ce parcours (ex. conseils auprès de personnes queer concernées, d'associations et/ou de pro ; diagnostic de dysphorie ; obtention de l'ALD désormais dépsychiatrisée de transidentité ; etc.) ?
[* sortie du placard = coming out]
3) Si une neuro-atypie fait également partie de vous, de votre personnalité (comme un TSA p.ex), comment les particularités dues à celle-ci influencent-elles, possiblement, la manière dont vous ressentez et/ou la façon dont vous réfléchissez, et, de ce fait, votre attitude au quotidien ?
4) [Si vous êtes porteur d'une neuro-atypie] Considérez-vous que votre étiquette (votre neuro-atypie) a pu vous porter préjudice à un moment donné, dans votre parcours de transition, pour avancer, ou bien votre mal-être et votre identité ont-ils toujours été respectés dès la reconnaissance officielle de votre dysphorie (attestation de dysphorie ; ALD hors liste, c'est-à-dire dépsychiatrisée) ?
5) Tant tout au long de votre vie qu'avec le moment de césure avant/après diagnostic, quelles relations avec le corps médical avez-vous connu ?
6) Depuis votre diagnostic de dysphorie et sa reconnaissance par une ALD hors liste (dépsychiatrisée), avez-vous l'impression de pouvoir être maître de votre parcours de transition (médical notamment) ?
Où en êtes vous dans votre parcours de transition (notamment au niveau médical) ?
7) A l'heure actuelle, comment concevez-vous votre corps, votre sexualité, et possiblement vos relations de couple ? Est-ce que les évolutions dans la façon dont vous percevez et considérez votre corps ont eu des répercussions sur votre sexualité voire sur vos relations de couple ? [Me concernant, l'évolution dans ma façon de percevoir mon corps m'a amené à concevoir mon corps sexué actuel et donc la sexualité différemment. Et étant donné qu'il s'agit d'un effet non seulement auquel je ne m'attendais pas du tout, mais qui est en plus assez peu abordé par la littérature *, j'aimerais recueillir vos descriptions, vos témoignages, pour que les personnes qui débutent une transition médicale puissent s'attendre à ce genre de répercussions.]
[* Voici le seul article, uniquement factuel, que j'ai pu trouver sur la question :
https://scholar.google.com/ ]
8) A l'heure d'aujourd'hui, est-ce qu'adopter des positions physiques liées à votre genre de naissance (p.ex adopter une légère cambrure par mégarde) vous renvoie toujours à votre corps d'origine ?
Est-ce que certains gestes ou actes sont susceptibles de raviver systématiquement votre dysphorie (ex. caresses sur les cuisses) ou un certain malaise corporel (ex. frottis alors que vous ne voulez pas d'un corps ni d'actes liés au corps féminin) ?
9) [Pour les personnes qui ont choisi de transitioner hormonalement.]
Comment vous projetez-vous dans l'avenir en sachant que votre corps va évoluer sans avoir de certitudes concernant ces changements ? Et de ce fait, comment faites-vous pour imaginer quel pourrait être votre parcours de vie, votre futur ? Par exemple, prenez-vous en considération le fait qu'un physique indifférencié puisse gêner les autres lorsque vous tentez de vous projeter professionnellement ? Parvenez-vous à vous projetez dans une vie de couple sans être capable d'imaginer précisément votre future anatomie ?
10) Arrivez-vous à concevoir, avec certitude, que votre dysphorie puisse disparaître complètement ?
Si vous avez transitioné médicalement, et que cette transition est aujourd'hui achevée (plus d'évolutions auxquelles s'attendre ni de volonté de changements), est-ce que vous appréhendez un retour de votre corps dysphorique (p.ex pour les personnes FtX l'appréhension que des formes féminines reviennent) ?
Si vous considérez votre transition médicale comme achevée, ressentez-vous encore un surnagement de votre dysphorie d'origine ou bien vivez-vous désormais en permanence avec un corps sans dysphorie ? [Étant FtX en transition hormonale, la projection dans corps sans dysphorie correspond pour moi à un corps que je ressentirais comme non typé, comme indifférencié, et, de ce fait, comme conséquemment dénué de dysphorie.]
[A indiquer : quelle a été la progression dans la réduction de votre mal-être corporel (s'est-elle plutôt faite par étapes ; ou plutôt progressivement ; ou bien un peu les deux à la fois) ? Décrire les changements remarqués au fur et à mesure de votre parcours de transition tels que le soulagement possible de votre dysphorie du fait de l'adoption d'un bon passing, l'évolution ressentie grâce à la testostérone (évolution évidemment progressive mais globalisante corporelle), le changement apporté par la mastectomie, l'influence possible du regard des autres, etc.]
10) A l'heure actuellement, assumez-vous extérieurement ce qui vous constitue ou préférez-vous minimiser le risque d'être perçu ouvertement comme trop déviant.
[A préciser :
- Portez-vous des éléments vestimentaires qui laisseraient deviner votre non-binarité ?
- Vous autorisez-vous à vivre pleinement vos émotions et votre personnalité ou préférez-vous faire profil bas (p.ex. en ne parlant pas trop ; en retenant une gestuelle susceptible de vous trahir ; en ne pas laissant pas apparaître d'expression évocatrice sur votre figure qui permettraient de vous caractériser) ?]
11) Quels sont les aspects de votre vie, que vous définiriez comme constitutifs de vous, et qui vous permettent de vous épanouir ?
[Par exemple me concernant :
- émotions, vision du monde, respect de toutes les formes de sensibilité, décatégorisation entre les êtres vivants que je m'autorise à vivre pleinement => véganisme, sentience et écologie
- échapper à toute forme de catégorisation binaire, ne pas devoir correspondre à une norme majoritaire, pouvoir vivre autrement, sans devoir répondre à des normes et des attentes qui ne correspondent pas aux miennes
- donner la possibilité à chacun d'effectuer librement de propres choix, et non influencer dans une voie]